Le règlement européen adopté en ce sens concerne au minimum 30 % du territoire de l’Union ! C’est dire à quel point les forêts et surtout les terres agricoles sont concernées. NTF, l’association qui représente les propriétaires privés, a invité un représentant de la Commission et la ministre Anne-Catherine Dalcq à éclairer ses membres. 21News était présent.
Soyons clairs : nul ne sait encore vraiment où l’on va concrètement. Ce n’est toutefois pas une raison… pour ne pas s’informer, compte tenu de l’ampleur de ce projet : il devrait impacter la plupart des propriétaires de forêts et terres agricoles. De quoi s’agit-il en quelques mots ? C’est en mai 2020 que la Commission européenne lance une stratégie en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030, avec pour sous-titre : Bringing nature back into our lives. De fil en aiguille, le règlement de restauration de la nature est adopté le 24 juin 2024. Or, contrairement à une directive, un règlement ne doit pas être implémenté par les Etats : il est immédiatement d’application, rappelle Frank Vassen, de la Commission européenne (DG Environnement). Autrement dit, il est aujourd’hui sur les rails, de sorte qu’on ne peut vraiment plus l’ignorer.
Des terres rendues à la nature ?
Ministre wallonne de l’Agriculture, de la Forêt, de la Nature, de la Ruralité, de la Chasse et de la Pêche, Anne-Catherine Dalcq (MR) souligne pour sa part que ce règlement marque une étape très innovante dans la promotion de la biodiversité. Tant la directive Oiseaux de 1979 que la directive Habitats de 1992 visaient une protection passive de la nature. Le règlement dont il est aujourd’hui question, connu sous l’acronyme anglais NRL (pour Nature Restoration Law) et français RRN (pour Règlement sur la Restauration de la Nature) vise une restauration active des milieux naturels. En un mot comme en cent, même si personne ne l’exprime de cette façon, on doit envisager que l’affectation actuelle de nombreuses parcelles soit remise en cause.
On en est aujourd’hui au stade de l’inventaire. La ministre Dalcq explique que son administration fait appel à de nombreux bénévoles des associations de protection de la nature, notamment, pour dresser un tableau de la situation. Concrètement : quels types de milieux sont dégradés et quelles sont les espèces ainsi en danger ? Elle insiste aussi sur le fait que rien ne sera entrepris sans une vraie concertation avec les propriétaires : «Nous allons le faire ensemble».
Qui va payer ?
On ne part cependant pas de zéro, rappelle Frank Vassen, car l’Europe dresse régulièrement un état de la situation. Dernier en date, celui de 2019 mettait clairement en lumière le plutôt bon état des forêts, mais aussi l’état beaucoup moins satisfaisant des zones agricoles. Gros points noirs : les zones humides, milieux lacustres et tourbières, ainsi que les prairies et dunes. Ce n’est pas nouveau.
Ne tournons pas autour du pot : certaines zones rares et menacées seront sans doute appelés à être élargies, au profit de leur pérennité… et au détriment de l’affectation actuelle des terres voisines. Comment les propriétaires de ces dernières seront-ils dédommagés ? Un fonds européen spécifique sera-t-il mis sur pied ou bien puisera-t-on dans l’argent de la PAC, la politique agricole commune ? Rien n’est fixé à ce jour.
La ministre met l’accent sur des mesures annexes : « Pour financer une politique, il ne faut pas nécessairement puiser dans la poche des citoyens. Cela passe aussi par des filières plus performantes .» Avec un soutien public. On ne saurait par ailleurs faire l’impasse sur les nombreuses initiatives déjà prises par les propriétaires terriens pour la préservation et la restauration des espaces, notamment par le biais de la formule « Ma parcelle en réserve naturelle ».
Guy Legrand
(Photo Belgaimage)