Malgré sa densité imbattable de radars de vitesse automatiques, la Belgique demeure l’un des pays européens où l’on se tue plus sur la route. Les chiffres compilés par l’association Mauto Défense révèlent un paradoxe : la politique de l’effet Doppler n’a pas réduit les accidents mortels ; ce sont bien d’autres facteurs, souvent refoulés par les autorités idoines – comme l’état du réseau, l’âge du parc automobile, la signalisation ou les mauvais comportements – qui pèsent plus lourd dans la balance.
Armée de 4 797 radars fixes sur ses 30 000 km², la Belgique détient un record européen de densité de ces appareils verts ou blancs, fixes et parfois mobiles.
Rapporté à la population, ce sont 400 radars par million d’habitants, loin devant la Suède (246), l’Italie (235) ou la Finlande (205).
En comparaison de la superficie ou de la longueur du réseau, la disproportion est encore plus flagrante : 159,9 radars pour 1 000 km² et 32 radars pour 1 000 km de routes. Aucun autre pays ne tient la dragée répressive aussi haute.
En théorie, une telle couverture nicherait la Belgique au pinacle de la sécurité routière européenne ; en pratique, le pays enregistre 43 décès par million d’habitants en 2023, soit un résultat moyen-bas : le septième plus mauvais sur dix-huit pays européens. À titre de comparaison, la Norvège (20 décès/million) et la Suède (22) affichent des taux deux fois plus bas, avec respectivement 427 et 2 635 radars — bien moins, relativement au kilométrage de leur réseau.
Quelques chiffres bien éloquents
Les chiffres compilés par Mauto Défense sont sans ambiguïté : aucune corrélation claire n’existe entre la densité des radars sur la route et la baisse de la mortalité. L’exemple de l’Italie et de la Pologne est à cet égard le plus révélateur. La mortalité y est presque identique – 52,4 décès par million d’habitants pour l’une, 51,5 pour l’autre – alors que l’Italie compte 13 882 radars contre seulement 600 en Pologne, soit vingt-quatre fois plus d’appareils pour un résultat identique. Un autre contraste frappant est celui entre le Portugal et la Grèce : le premier enregistre 60,2 morts par million d’habitants, le second 59,6, alors même que la Grèce a trois fois plus de radars.
Les cas du Danemark et de la Suède confirment la tendance. Ces deux pays affichent d’excellents bilans — 27 et 22 morts par million d’habitants — mais ont adopté des politiques diamétralement opposées : le Danemark se contente de 0,4 radar pour 1 000 kilomètres de route, quand la Suède en déploie 19. Quant à la comparaison entre la Belgique et l’Autriche, elle illustre une fois de plus la dissonance entre densité de contrôle et sécurité réelle : la mortalité y est quasi identique (44 contre 43), mais la Belgique dénombre huit fois plus de radars, avec 159,9 appareils pour 1 000 km² contre 19,9 en Autriche.
De tels écarts désavouent ce présupposé lien mécanique entre la multiplication des radars et le sauvetage de vies humaines. Ces dispositifs peuvent bien infléchir les vitesses moyennes sur certains axes, mais n’ont qu’une influence marginale sur le danger global de la circulation, qui dépend d’un rhizome de paramètres bien plus complexes.
Un asphalte de qualité
Le premier facteur est, sans que c’en devrait être une surprise, l’état des routes.
Dans l’évaluation européenne de la qualité du réseau, la Belgique ne récolte qu’une note de 4,32 points sur 7, but à but avec la Pologne, alors que la Suisse (6,3), les Pays-Bas (6,4) ou l’Autriche (6) dominent le classement. Ces derniers pays affichent des taux de mortalité bien moindres (28 à 34 décès/million).
Le Portugal, champion d’Europe de la mortalité (60,2), possède l’un des meilleurs réseaux notés (6/7), mais plus de la moitié de ses accidents mortels s’y produisent sur des routes secondaires – rurales, godronnées, mal entretenues, mal éclairées. La qualité moyenne masque les défaillances locales : ce n’est donc pas l’autoroute qui tue.
Vieillissement du parc automobile : un risque sous-estimé
Autre variable déterminante : l’âge des voitures. Les pays les plus touchés par les accidents ont les plus anciennes : Grèce (17,3 ans), Pologne (14,9), Portugal (13,6), Italie (12,5).
À l’inverse, la Belgique (9,8), la Norvège (10,8) et le Royaume-Uni (10,3) disposent de flottes plus récentes — un atout pour la sécurité passive (freins, ABS, aides à la conduite).
Mais cela ne compense ni le mauvais entretien structurel du réseau, ni l’usure des véhicules les plus anciens dans les classes populaires.
La densité de circulation : facteur aggravant
Les comparaisons de quantités de véhicules par kilomètre de réseau mettent aussi en évidence une relation partielle : plus les routes grouillent de véhicules plus le risque d’accidents augmente.
La Grèce (125 véhicules/km), l’Italie (88) ou le Portugal (89) figurent parmi les pays les plus meurtriers.
La Belgique, bien que très dense, ne compte « que » 40 véhicules/km, tandis que la Norvège (31) conserve la combinaison gagnante : faible densité, faible mortalité.
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