Le MR a remporté la semaine dernière un dossier symbolique concernant les délais de préavis en cas de licenciement. Ceux-ci seront désormais limités à un an maximum. Le gouvernement met ainsi fin à une réforme devenue coûteuse, mise en place en 2013 par le gouvernement Di Rupo. À l’époque, il s’agissait d’un dossier emblématique des socialistes, ce qui provoquera sans doute une grande colère des syndicats. La réforme actuelle est elle aussi symbolique, car ses effets ne se feront sentir que dans 17 ans.
Le ministre du Travail et de l’Économie, David Clarinval (MR), est en pleine modernisation du marché du travail. À côté de la limitation dans le temps des allocations de chômage, c’est peut-être l’un des dossiers les plus sensibles pour les opposants au gouvernement De Wever. Un dossier hautement symbolique.
Tout tourne autour d’un accroissement de la flexibilité. D’une part, Clarinval veut ouvrir les flexi-jobs à tous, d’autre part, il veut limiter les coûteux délais de préavis. Car cela représente évidemment un coût pour les entreprises. De longs délais de préavis signifient soit garder quelqu’un contre sa volonté avec peu de motivation, soit payer un salarié qui ne travaille plus dans l’intérêt de l’entreprise.
Il s’agit ici de revenir sur une mesure, symbolique et coûteuse, des socialistes du gouvernement Di Rupo, auquel participait aussi le MR. Les délais actuels ont été introduits par la socialiste flamande Monica De Coninck (Vooruit), à la suite du statut unique, que les employeurs ont eu du mal à accepter. Le VBO, l’Unizo, le Voka, la Fédération des agriculteurs et l’UCM y étaient farouchement opposés.
Le mécontentement s’est aggravé quand le Conseil d’État a jugé que la loi créait une nouvelle forme d’inégalité entre travailleurs, et ensuite quand la Cour constitutionnelle a supprimé en 2015 l’exception pour les ouvriers du bâtiment. Un ouvrier avec 20 ans d’ancienneté avait droit à 16 semaines de préavis, contre 62 pour les autres.
La semaine dernière, après une énième réunion nocturne du « kern » (le noyau du gouvernement), Clarinval a pu présenter ses premiers plans pour le marché du travail. Il a choisi Le Soir pour annoncer la nouvelle, un choix symbolique pour le premier ministre libéral du Travail depuis 104 ans.
La Belgique a l’un des délais de préavis minimaux les plus longs en Europe, dépendant de l’ancienneté. Par exemple, 12 semaines après 2-3 ans d’ancienneté. En Allemagne : 4 semaines ; au Royaume-Uni : 1 semaine ; en France et aux Pays-Bas : 1 mois. Certains pays limitent aussi le montant total de l’indemnité de licenciement.
L’objectif est clair : rapprocher la Belgique des standards européens, tant au niveau des pensions, du taux d’emploi que des délais de préavis. Mais cela heurte les syndicats. Ce dossier est toutefois plus accessible que la réduction des cotisations sociales ou une réforme fiscale du travail.
David Clarinval veut surtout rendre l’emploi plus flexible. Historiquement, il l’est moins que chez nos voisins, et encore moins qu’aux États-Unis. Le Belge – Flamand ou Wallon – change rarement de travail. Mais travailler toute sa vie dans la même entreprise n’est plus réaliste.
Pour les employeurs, la réforme est à double tranchant : ils peuvent engager plus vite (car le travailleur n’a pas à prester un long préavis), mais risquent aussi de perdre plus vite leurs bons éléments. Le vrai enjeu pour eux : réduire le coût lié à l’ancienneté.
Que change-t-on concrètement ? Actuellement, lorsqu’une entreprise licencie un employé, celui-ci conserve son poste durant le préavis pour chercher un nouvel emploi. Souvent, il ne travaille plus mais continue à être payé. Le système est complexe, notamment pour les contrats d’avant 2014, où le calcul du préavis se fait en deux étapes (avant et après la réforme de 2014).
Avec la réforme Clarinval, un troisième volet s’ajoute. Mais comme elle ne s’applique qu’aux nouveaux contrats, ses effets ne seront ressentis que dans 17 ans.
Conclusion : les entreprises devront encore payer pendant des décennies la note salée du statut unique symbolique mis en place par le gouvernement Di Rupo avant que la réforme de Clarinval ne soulage leur charge financière.
Lode Goukens
(Photo : Belgaimage)