En annonçant la reconnaissance de l’État de Palestine, Emmanuel Macron vient de prendre une décision incohérente par rapport à ses déclarations précédentes et aux lourdes conséquences. Derrière les postures diplomatiques et les appels à la paix, cette décision trahit non seulement les engagements qu’il avait lui-même posés comme conditions préalables, mais elle envoie surtout un signal aussi dangereux qu’inutile.
Il faut d’emblée rappeler les faits. Depuis le 7 octobre, la France affirmait que toute avancée vers la reconnaissance d’un Etat palestinien devait être conditionnée à la libération des otages, à l’écartement du Hamas du pouvoir à Gaza et à l’assurance de la sécurité d’Israël. Ces conditions sont loin d’être réunies. De nombreux otages, vivants ou décédés, sont toujours détenus. Le Hamas – organisation reconnue comme terroriste par l’Union européenne -, même si elle ne contrôle plus qu’une petite partie du territoire, est loin d’être vaincue et les attaques contre Israël se poursuivent.
Et pourtant, Paris choisit de reconnaître un État palestinien. Une décision que l’on voudrait présenter comme historique, mais qui n’est en réalité que symbolique. Une déclaration de principe sans effet concret. Aucun changement territorial, aucune avancée diplomatique réelle, aucune amélioration de la vie quotidienne ni pour les Palestiniens, ni pour les Israéliens. C’est un acte vide de substance, mais lourd de conséquences politiques.
Ce geste diplomatique pourrait même s’apparenter à une prime au terrorisme. Il vient récompenser, de fait, une stratégie de violence, en laissant entendre qu’on peut arracher une reconnaissance internationale à la suite d’une attaque d’une brutalité inouïe. Ce n’est pas ainsi qu’on construit la paix.
La France, en agissant seule, affaiblit aussi sa crédibilité sur la scène internationale. Elle rompt avec l’idée d’une position équilibrée, et s’exclut d’elle-même du rôle de médiateur équidistant que beaucoup espéraient encore voir en elle. Elle trahit ses alliés israéliens, mais aussi les Palestiniens modérés, ceux qui refusent la logique du Hamas et aspirent à un véritable processus de paix.
Reconnaître un État sans frontières définies, sans autorité politique unifiée, sans projet de paix crédible, c’est reconnaître un fantasme. C’est poser un geste politique à usage interne, destiné à séduire une partie de l’opinion, sans se soucier des répercussions sur le terrain. Par ce choix, Emmanuel Macron tourne indirectement le dos aux Juifs de France (qui forment la première communauté juive d’Europe).
Il ne s’agit pas de nier le droit des Palestiniens à l’autodétermination ni la souffrance des Gazouis, mais de rappeler que ce droit ne peut être réalisé au prix du double discours. Emmanuel Macron, en voulant absolument exister politiquement par ce biais, démontre encore une fois l’impuissance d’un chef d’Etat au crépuscule. Et il trahit non seulement sa parole, mais aussi l’idée même d’une diplomatie responsable.
Nicolas de Pape
(Ludovic MARIN / AFP)