Le député PS Martin Casier (à gauche) a une nouvelle fois critiqué la ministre MR des Médias Jacqueline Galant (à droite), dénonçant la passivité du gouvernement francophone face à la fusion annoncée des deux mastodontes de la presse écrite belge : Rossel et IPM.
Selon Casier, cette fusion constitue un tournant majeur pour le paysage médiatique, susceptible de fragiliser davantage le pluralisme de l’information en Fédération Wallonie-Bruxelles, alors même que la ministre chargée des médias reste, selon lui, trop en retrait dans la gestion politique du dossier.
Une fusion qui secoue le monde de la presse
En juin 2025, les groupes Rossel et IPM ont officialisé la signature d’un protocole de fusion, qui prévoit notamment la reprise par Rossel de l’activité de presse écrite d’IPM, incluant des titres majeurs comme La Libre Belgique, La DH ou L’Avenir. Le groupe Rossel, déjà propriétaire du Soir et d’actifs partagés comme L’Écho et 50 % de RTL Belgium, ambitionne de consolider une position dominante dans le secteur. Un accord de fusion entre les deux groupes a été signé voici quelques jours.
L’opération est toutefois conditionnée à l’approbation de l’Autorité belge de la concurrence (ABC), qui doit examiner le dossier au premier trimestre 2026. Officiellement, l’ABC se penchera sur le dossier à partir du mois de janvier et doit remettre sa décision dans les 55 jours. Mais en réalité, l’Autorité s’est déjà saisie du dossier et a déjà entendu les arguments des deux groupes de presse, mais aussi d’autres groupes, notamment l’Association de Journalistes Professionnels (AJP) qui a déjà manifesté ses inquiétudes pour la sauvegarde du pluralisme et de l’emploi au sein de la presse francophone. Les informations récentes, relayées par Forbes.be, qui font état de listes noires et de projet de restructuration voire d’épuration au sein des éditions de l’Avenir ont mis l’AJP en alerte. L’Association des journalistes professionnels et plusieurs sociétés de rédaction ont demandé davantage de garanties pour protéger le pluralisme et l’indépendance des rédactions.
En attendant, des mesures d’économie ont déjà été annoncées pour gérer la période de transition, dont des jours de chômage économique pour le personnel de l’Avenir et des réductions contractuelles pour certains collaborateurs, notamment dans les collaborateurs sportifs qui verront leurs émoluments rabotés de 8%.
Pluralisme, emplois, modèles économiques : des inquiétudes nombreuses
Ce n’est plus un secret, la fusion soulève des craintes fortes du côté des syndicats, des journalistes et de plusieurs partis politiques, qui redoutent une concentration accrue des médias, une réduction des voix éditoriales et une pression accrue sur l’emploi.
C’est dans ce contexte que Martin Casier (PS) a tweeté pour attaquer la ministre Jacqueline Galant (MR), lui reprochant une approche jugée trop timide et l’absence d’un leadership fort dans un débat qui, selon lui, touche au cœur même de la démocratie. Une critique déjà partagée par d’autres voix politiques, y compris au sein du PS, qui ont appelé à un débat démocratique élargi au Parlement plutôt qu’à une simple surveillance réglementaire.
Réponse de Jacqueline Galant : vigilance, mais pas d’intervention directe
De son côté, la ministre des Médias a insisté à plusieurs reprises sur son rôle de veille et d’écoute des acteurs du secteur, notamment via des rencontres avec l’Association des journalistes professionnels. Elle a déclaré qu’elle suivrait de près l’évolution du dossier avec l’Autorité belge de la concurrence, tout en appelant les acteurs concernés à fournir des garanties sur le maintien du pluralisme.
Pour Galant, le rôle politique n’est pas de bloquer un projet d’entreprises privées, mais de s’assurer que le pluralisme, la diversité éditoriale et la qualité de l’information ne soient pas compromis dans le cadre d’un regroupement industriel.
Un débat politique qui ne fait que commencer
La réaction de Martin Casier reflète une tension croissante sur l’avenir du paysage médiatique francophone belge, où plusieurs acteurs réclament davantage d’initiative politique face à ce qui est perçu comme une dislocation progressive du pluralisme et une concentration des pouvoirs médiatiques.
Alors que la décision de l’Autorité de la concurrence est encore attendue, le débat politique promet de rester intense dans les prochaines semaines, avec des parlementaires socialistes déterminés à transformer l’affaire en véritable enjeu démocratique plutôt qu’en simple dossier administratif.
Demetrio Scagliola
(Photos Belgaimage)