De la « victoire » annoncée par Trump aux pièges très concrets de la démilitarisation, de la force internationale et de la gouvernance Donald Trump a voulu frapper fort : discours triomphal à la Knesset, poignée de main avec Mahmoud Abbas, arrivée remarquée à Charm el-Cheikh et déclaration cosignée avec l’Égypte, le Qatar et la Turquie pour « cimenter » le cessez-le-feu. La séquence est calibrée et les images poignantes. Mais derrière le storytelling, se joue désormais la partie difficile : transformer un arrêt des combats en ordre politique durable à Gaza – sans naïveté sur le Hamas, sans enlisement pour les forces internationales, et sans contradiction insurmontable entre capital politique à Washington et réalités israéliennes et palestiniennes.
Phase 1 : l’urgence humanitaire et l’échange
Le premier étage du « plan en vingt points » est exécuté : cessez-le-feu effectif, libération des derniers otages vivants, restitution progressive des dépouilles et élargissement massif de prisonniers palestiniens. La logistique humanitaire s’accélère ; les convois s’additionnent sur les axes d’accès, tandis que les médiateurs (Égypte, Qatar, Turquie) endossent un rôle de garants. L’essentiel, ici, tient à la crédibilité de l’échange et à sa fluidité dans les prochains jours : rien n’empoisonne autant une trêve qu’un doute sur la cadence des libérations ou des retours de corps. Le cœur de la première phase est bien enclenché – et c’est ce qui rend politiquement possible la suite.
Le grand absent et la diplomatie des images
L’absence de Benyamin Netanyahou au sommet égyptien a servi de révélateur : la « paix Trump » se joue aussi sans le Premier ministre israélien dans la photo de famille. Officiellement, une question de calendrier religieux ; officieusement, un équilibre diplomatique fragile, où certains acteurs régionaux ne souhaitaient pas sa présence. Le message, pour l’instant, est double : à Jérusalem, la coalition reste arc-boutée sur la sécurité ; à Charm el-Cheikh, on veut montrer une dynamique multilatérale réinvestissant Gaza. La mise en scène fonctionne, mais ne dit rien encore des lignes rouges israéliennes lorsque la « phase 2 » entrera dans le dur.
Phase 2 : démilitariser sans réarmer le chaos
C’est la pierre d’achoppement classique de toutes les « paix » du Proche-Orient : qui désarme, qui vérifie, qui sanctionne ? Le plan évoque l’éradication des capacités offensives du Hamas (tunnels, ateliers, stocks) et l’objectif d’une « zone déradicalisée ». Il ménage une sortie pour ceux qui renoncent (amnistie, exil sécurisé), tout en voulant œuvrer à la constitution d’une police palestinienne opérationnelle. Mais, pour l’heure, le Hamas occupe de facto des fonctions d’ordre public dans l’enclave, avec checkpoints et rappels musclés à des clans rivaux : une réalité que Washington assume « temporairement » pour éviter le vide sécuritaire… au risque de figer un pouvoir qu’on promet de désarmer demain. C’est ici que l’approche devra être chirurgicale : trop faible, elle sanctuarise les réseaux ; trop brutale, elle casse la trêve.
La FIS : ne pas confondre interposition et stabilisation
La Force internationale de stabilisation (FIS) est la charnière du plan. Sur le papier : mandat onusien, participation d’États européens et arabes, appui à une police palestinienne, et retrait israélien par paliers avec zone tampon transitoire côté est. Sur le terrain : la FIS ne vaudra que par ses règles d’engagement. Le précédent libanais l’a montré : une mission d’observation impuissante devient une ligne Maginot. À l’inverse, une force dotée d’un mandat clair (inspection, confiscation, réaction graduée) change l’équation. Les capitales européennes sont prêtes à prendre leur part, notamment via la relance d’EUBAM-Rafah, mission civile de l’UE au poste frontière. Là aussi, sortir du symbole : EUBAM peut sécuriser un flux et un point de passage ; elle ne « démilitarise » pas à elle seule un territoire.
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