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Israël gagnera peut-être une guerre… mais risque d’en perdre deux autres (Édito)

par Nicolas de Pape

Le Hamas n’a jamais caché son objectif : durer. Durer le plus longtemps possible, quitte à plonger son propre peuple dans la souffrance, détourner l’aide humanitaire à son profit et en attribuer la malnutrition à Israël. L’État hébreu mène donc trois guerres en parallèle :

  • la guerre militaire, qu’il finira sans doute par gagner ;
  • la guerre humanitaire, qu’il n’est pas en mesure de gagner à ce jour ;
  • la guerre de l’information, qu’il a déjà perdue, avec la bénédiction des ONG et d’une grande partie des médias.

Une puissance militaire indiscutable

Première puissance militaire de la région, Israël a démontré sa supériorité technologique, notamment dans les airs, lors de la guerre éclair de 12 jours contre l’Iran. En quelques heures, le ciel de Téhéran était sous contrôle israélien et le Guide suprême Khamenei réfugié dans une grotte.

Les bombardements en profondeur de l’US Air Force – une technique que l’État hébreu ne maîtrise pas encore totalement – ont permis de retarder de quelques années l’inévitable : un Iran doté de l’arme nucléaire et capable, potentiellement, de détruire une troisième fois le Temple juif.

Netanyahu, un homme seul mais solide

Benjamin Netanyahu (photo), que l’on accuse volontiers d’être corrompu, avide de pouvoir et « criminel de guerre », a montré un sang-froid remarquable depuis le massacre du 7 octobre 2023. Aucun autre homme politique israélien n’a aujourd’hui sa stature ni son lien presque affectif avec Donald Trump, le 47e président des États-Unis et le plus pro-israélien de l’histoire américaine.

Netanyahu sait parler à l’Amérique patriote et religieuse, sait flatter son allié en anglais parfait. Résultat : Israël a repoussé l’Iran, affaibli le Hezbollah, neutralisé les capacités de nuisance syriennes, tout en ménageant l’Égypte, l’Arabie saoudite et la Jordanie, qui voient dans l’élimination du Hamas une opportunité, non une menace.

Le Premier ministre a rendu fierté et sécurité au peuple israélien en réhabilitant un Mossad et une armée qui avaient failli le 7 octobre. Il remonte dans les sondages et ses adversaires politiques, jugés de moindre envergure, peinent à l’ébranler. Même s’il reste contesté, n’a pas terminé sa guerre contre la Cour suprême et semble ne pas vouloir finir la guerre à Gaza pour ses intérêts personnels.

Gaza : un bourbier humanitaire et médiatique

Car sur le terrain, à Gaza, c’est une autre histoire. Le conflit prend des airs de « Vietnamisation ». Israël a tenté de reprendre la main sur l’aide humanitaire, notamment via la Fondation humanitaire de Gaza, sécurisée par Tsahal. Mais nourrir 2,3 millions de personnes dépasse, semble-t-il ses capacités.

Faute de mieux, Israël a tendu la main aux ONG et à l’ONU, admis le parachutage de vivres, sans réussir à convaincre les humanitaires de collaborer avec lui plutôt qu’avec le Hamas. L’UNRWA affirme disposer de 6 000 camions bloqués à la frontière, alors que l’ONU reconnaît qu’entre le 19 mai et le 31 août, 1 753 des 2 010 camions entrés à Gaza ont été détournés – seulement 260 étant réellement arrivés à destination.

Le Hamas, grâce à ce marché noir et à ces détournements, recrute de nouveaux combattants et finance sa survie. Vingt otages sont toujours entre ses mains, certains souffrant de scorbut dans les tunnels souterrains.

Un dilemme stratégique

Israël doit-il cibler davantage ses attaques, renoncer à la guerre totale et se concentrer sur l’acheminement de l’aide, devenu le véritable levier de pouvoir à Gaza ? Ou aller « jusqu’au bout », quel qu’en soit le prix ?

Les familles des otages exigent en priorité leur libération, tandis que celles des soldats tombés réclament que leur sacrifice ne soit pas vain.

En attendant, en Occident et en Belgique, certains des soutiens d’Israël sont en train de tourner casaque devant l’étendue des destructions à Gaza.

Telle est la quadrature du cercle israélienne : gagner la guerre militaire, mais peut-être perdre durablement les deux autres.

Nicolas de Pape

(Photo : GPO/Handout via Xinhua/ABACAPRESS.COM)

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