Favori du scrutin présidentiel, Karol Nawrocki, historien de 42 ans a été élu ce dimanche président de la République de Pologne. Soutenu par le principal parti d’opposition au gouvernement, le national-conservateur Droit et Justice (PiS), il l’a emporté d’une courte tête face à Rafal Trzaskowski, le maire libéral et pro-européen de Varsovie, allié du gouvernement centriste. Le PIS conserve donc la présidence qui était aux mains d’Andrzej Duda.
Un nationalisme assumé, ancré dans l’Histoire
Né à Gdansk, ville portuaire emblématique du mouvement Solidarnosc, Nawrocki s’est imposé dans le paysage politique polonais par sa défense vigoureuse d’une mémoire nationale affranchie des influences étrangères, notamment soviétiques. Directeur du Musée de la Seconde Guerre mondiale entre 2017 et 2021, il a ensuite pris la tête de l’Institut de la mémoire nationale (IPN), organisme chargé de documenter les crimes nazis et communistes en Pologne.
Historien spécialisé dans la répression politique et le crime organisé sous le régime communiste, Nawrocki s’est attiré les foudres de Moscou pour sa politique active de « décommunisation » : en 2024, la Russie l’a inscrit sur sa liste de personnes recherchées, en raison notamment de son rôle dans le retrait de monuments soviétiques.
Une campagne centrée sur la souveraineté et l’identité
Son slogan de campagne – « La Pologne d’abord, les Polonais d’abord » – a donné le ton : souverainisme, priorité nationale, et critique d’une Europe jugée trop intrusive. S’il affirme soutenir la cause ukrainienne face à l’invasion russe, Nawrocki a dénoncé à plusieurs reprises la générosité des aides polonaises envers les réfugiés ukrainiens.
Dans une vidéo virale, il affirmait : « Les prestations sociales doivent revenir en priorité aux citoyens polonais », appelant à une loi pour assurer la priorité des Polonais dans les hôpitaux et les services publics. Il a aussi fustigé le manque de reconnaissance de la part de Kiev, allant jusqu’à accuser le président Zelensky d’« ingratitude » et « d’insolence ».
Karol Nawrocki revendique par ailleurs un lien fort avec Donald Trump. Avant la présidentielle américaine de 2024, il avait été reçu à la Maison Blanche par le milliardaire redevenu président. « Vous allez gagner », lui aurait confié Trump.
Karol Nawrocki a su capter une large frange de l’électorat conservateur, lassée du centrisme europhile et inquiète des mutations culturelles et démographiques. Sa victoire consacre un basculement idéologique en Pologne, où la question identitaire semble désormais primer sur les alliances européennes traditionnelles.
Reste à savoir si Nawrocki parviendra à fédérer une nation profondément polarisée, ou s’il s’inscrira dans une présidence de rupture, au risque d’une nouvelle crise politique au cœur de l’Union européenne. Le président polonais mènera certainement la vie dure à un gouvernement qui n’est pas de couleur politique. En effet, les pouvoirs du président en Pologne sont assez importants avec un droit de véto législatif, et de larges pouvoirs en matière de défense de politique étrangère. La victoire du candidat du PIS est une défaite et un avertissement sérieux pour la coalition gouvernementale dirigée par le Premier Ministre Donald Tusk.
La rédaction
(Photo Belgaimage)