Le Parti socialiste traverse une zone de turbulence symbolique après la parution d’un éditorial au vitriol dans La Libre Belgique, intitulé « Le PS à la dérive ». Signé par le rédacteur en chef Dorian de Meeûs, le texte dénonce la perte de repères du parti de Paul Magnette, incapable selon lui de “parler à ceux qui travaillent” et désormais englué dans une “victimisation morale” face au discours offensif du MR.
Mais la véritable onde de choc ne vient pas de la plume du journaliste : elle vient du partage enthousiaste qu’en a fait un élu socialiste lui-même, le bourgmestre d’Awans, Thibaut Smolders (PS), qui approuve ouvertement les critiques formulées contre son propre camp.
Sur les réseaux sociaux, l’élu wallon a relayé l’édito en appelant à un sursaut idéologique. « À force de chercher qui est Bouchez, on oublie qui nous sommes », écrit-il, estimant que « passer son temps à débattre pour savoir si Georges-Louis Bouchez est d’extrême droite ou non, c’est une branlette intellectuelle, spécialité du Boulevard mais qui ne ramène pas une voix. »
Pour Smolders, le PS doit se retrouver lui-même avant de continuellement pourfendre son adversaire de prédilection qu’incarne plus que tous, dans son style très singulier, le président du MR.
Un malaise idéologique qui refait surface au PS
Le bourgmestre appelle aux retrouvailles entre les tropismes fondamentaux du socialisme et son parti, historiquement celui de la laïcité, fidèle à ses convictions progressistes, aux travailleurs et à la solidarité qui finance des politiques publiques efficaces et justes.
« Le PS n’a pas besoin de se réinventer en réagissant à Bouchez. Il doit simplement assumer ce qu’il a été dans ses meilleurs jours : un mouvement populaire, ancré dans le réel », ajoute-t-il.
Ce message, bien plus qu’une simple opinion personnelle, exsude le malaise irrépressible d’une aile socialiste laïque et productiviste, inquiète de sentir son camp renier sa ligne idéologique historique au profit de discours communautaristes et moraux.
Dans un contexte de recomposition politique à gauche, cette fracture larvée entre traditionnalistes socialistes et hérauts d’un PS imbibé de sociologie contemporaine refait surface.
À moins d’un an des élections fédérales, le billet de Thibaut Smolders révèle une tension que beaucoup, au Boulevard de l’Empereur, préféraient jusqu’ici tenir hors champ : celle d’un parti en quête de cohérence, partagé entre héritage ouvrier et adaptation culturelle à une époque où les repères de la gauche se brouillent.
(PHOTO Alexandre MARCHI)
HdB