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Ô rage ! Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie ! N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ? (*) (Carte Blanche)

par Contribution Externe

Avant février 2022, D. Trump n’aurait eu aucun moyen de pression sur les Européens : nous formions, grâce à nos accointances avec la Russie,  le bloc géopolitique le plus puissant du monde.

Il n’aura fallu que trois ans pour que nous perdions tout, y compris notre dignité, puisque désormais lorsque les Etats-Unis sifflent, la vieille Union européenne se couche !

Depuis la chute du Mur de Berlin et l’explosion de l’ex-URSS, les liens s’étaient éminemment renforcés entre l’UE et la naissante fédération de Russie.

Le président Poutine doit d’ailleurs une fière chandelle aux Européens (notamment au chancelier allemand Gerhard Schröder et à la chancelière Angela Merkel) qui ont financé sans compter (fonds structurels européens lors de la présidence de Jacques Delors à la Commission européenne, fonds de la Banque Européenne d’Investissement, et consorts) la reconstruction de l’État russe tombé en déliquescence pendant le mandat de l’alcoolique Boris Eltsine.

Certes, l’UE n’a pas financé la reconstruction de la Russie par bonté d’âme ou par pur altruisme, mais parce que nous étions effrayés (surtout les Allemands) par les conséquences du chaos en Russie (souvenez-vous de tous ces généraux qui ne recevant plus leur solde se sont mis à vendre des armements chimiques, bactériologiques, atomiques au tout venant, alimentant les groupes terroristes du monde entier…).

Le bon côté de notre intervention c’est que nous nous assurions un accès privilégié aux colossales ressources minières, agricoles et énergétiques du plus grand territoire du monde.

Petit à petit nos approvisionnements devenaient abondants et bon marché et La Russie se modernisait, se disciplinait, se renforçait, s’enrichissait.

Tout cela a commencé à inquiéter les Etats-Unis qui ne voyaient pas d’un bon œil les liens économiques et même politiques croissants entre la puissance économique de l’UE et la puissance militaire (nucléaire), agricole et minière de la Fédération de Russie.

Le danger, selon le Département d’État américain, était qu’à terme nous aurions pu constituer le bloc géopolitique le plus vaste et le plus puissant du monde, supérieur à celui des Etats-Unis (Amérique du Nord et Amérique du Sud, depuis la doctrine Monroe) ou à celui de la Chine (et tous les pays sous son influence, c.à.d. tous ceux impliqués dans sa « Route de la soie ») pris séparément.

En effet l’axe horizontal Europe-Russie (qui va du Groenland à Vladivostok)  est plus vaste géographiquement que l’axe vertical Américain (qui va de l’Arctique à l’Antarctique).

Il fallait donc trouver un moyen de saboter cette belle entente (essentiellement économique) entre Européens et Russes.

L’Ukraine en fournissait le moyen: le déclencheur majeur.

Il était de notoriété publique que les Russes avaient accepté l’indépendance de l’Ukraine qu’à la condition – sine qua non – qu’elle promette de demeurer neutre.

Moscou ne voulant pas des forces de l’OTAN à ses frontières, et surtout pas dans la zone géostratégique de Kiev, et de la Crimée.

La Crimée et sa vaste ville portuaire de Sébastopol a toujours été depuis Pierre le Grand, une zone maritime militaire stratégique pour la Russie.

Lorsque le président Zelensky a officiellement demandé d’intégrer et l’OTAN et l’UE, il savait pertinemment ce qu’il allait enclencher : une réaction épidermique, instinctive de la part du Kremlin.

Il savait qu’au nom de la raison d’État, Moscou se fichait pas mal du droit international et du respect de la souveraineté d’un État.

Lorsque l’Ukraine décide subitement et unilatéralement de se vendre à l’OTAN et à l’UE, elle constitue automatiquement un péril existentiel pour la Russie.

Les faucons du Département d’État américain le savaient.

Il leur suffisait donc de convaincre le président Zelensky de son bon droit et de l’assurer qu’avec le soutien de l’OTAN, des Etats-Unis et de l’UE, il ne pouvait que gagner dans sa confrontation avec la Russie. Funeste erreur.

Par ailleurs, le président Trump a raison lorsqu’il refuse d’employer le terme « agression » utilisé par l’UE pour qualifier l’ « opération militaire spéciale » en Ukraine.

Ne fut-ce que pour une simple raison de sémantique : en effet, on parle d’agression lorsqu’on commet un acte hostile sans qu’il y ait eu de provocation préalable.

Or dans le cas de l’Ukraine, il y a bien eu provocation et offense à la Russie (non pas selon le droit positif international, mais selon les critères de « realpolitik » clairement annoncés par Moscou, lors des accords de Minsk).

L’action du président Zelensky a provoqué la réaction du président Poutine.

Peu importe le discours européen sur le respect de l’État de droit et de la souveraineté territoriale d’un État.

Nous savions tous (Européens et Américains) que lorsque la patrie russe est en danger, les dirigeants russes se fichent comme d’une guigne du droit international et de la souveraineté de l’État qui représente une menace.

Le Kremlin avait annoncé la couleur : « si vous cessez d’être neutres, nous interviendrons« .

Le régime de Kiev a récolté ce qu’il a semé, en toute connaissance de cause.

Il a joué et il a perdu.

Il doit en assumer les conséquences.

Chapeau bas aux faucons du Département d’Etat américain (de l’ancienne administration), c’était un coup de maître : aujourd’hui, les Européens ont rompu leurs liens avec les Russes et tout rentre dans l’ordre : le bloc géopolitique américain est, et reste, le plus puissant du monde, les Européens ont retrouvé la place qu’ils n’auraient jamais dû quitter : celle de vassaux dociles.

« Si la liberté d’expression signifie quelque chose, c’est le droit de pouvoir dire aux gens ce qu’ils ne veulent pas entendre » (George Orwell).

Et ce matin je me se sens autant « orwélien » que cornélien.

Carl-Alexandre Robyn

Ingénieur-conseil en valorisation de stratus

(Photo Belgaimage)

(*) « Ô rage ! Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie !

N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?

Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers

Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ? » (Corneille, Le Cid, Acte I, scène 4, monologue de Don Diegue)

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