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Pierre Verjans (ULiège) : « La gauche réformiste est en panne de projet car le capitalisme apparaît comme étant sans alternatives »

par Maxence Dozin

Pour le professeur Verjans, nos démocraties – et plus largement tous les pays, quels qu’ils soient sont dans un « équilibre instable ». Le professeur met en garder sur le fait que si capitalisme, poussé dans les années 1980 par la gauche « modérée » qui aujourd’hui le combat, apparaît comme étant sans alternative, il doit être considéré en tant que système et pas en tant qu’offre politique émanant d’un parti ou l’autre.

21News : Comment expliquer, selon vous, une certaine faillite des partis de gauche traditionnelle, ou « modérée », d’avoir pu protéger les travailleurs contre ce qu’ils dénoncent comme étant les excès d’un système de capitalisme dit « débridé » ?

Pierre Verjans : Le problème, je dirais, de cette gauche modérée, c’est qu’elle ne parvient pas, lorsqu’elle arrive au pouvoir, à prendre des décisions, ou à imposer des décisions quand elle doit négocier avec des partenaires – en tout cas des décisions qui permettent de répondre aux attentes de leurs électeurs. La question n’est pas seulement européenne ; elle se pose aussi aux États-Unis. Si les résultats de l’extrême-droite sont si forts en Europe, c’est aussi parce que les partis socio-démocrates n’ont pas réussi à limiter les effets du capitalisme néolibéral. Il faut dire que pendant que la gauche réformiste était au pouvoir, les délocalisations d’entreprises ont continué, le chômage massif des gens qui avaient le moins de formation intellectuelle a continué, et la dégradation des conditions de travail des gens moins diplômés a continué. On se retrouve donc avec une partie de la population qui continue à souffrir. Et par ailleurs, avec la facilitation des voyages internationaux, il y a effectivement des migrants du mondes entier qui, eux, sont prêts à prendre des risques énormes pour essayer de trouver de meilleures conditions de vie que chez eux où, effectivement, le capitalisme est totalement débridé quand il existe ou, pire, il s’agit simplement de systèmes de type féodaux ou pré-féodaux qui existent. Donc effectivement, les gens qui essayent de venir n’ont pas pour but de profiter du système social, contrairement à ce que beaucoup ne comprennent pas, parce qu’ils ne connaissent pas le système social tout simplement, mais pour essayer de travailler dans une société où, quand on a gagné de l’argent, on peut garder l’argent qu’on a gagné.

21News : Peut-on replacer la genèse de cette faillite de la gauche dite « modérée » aux années 1980 et notamment à la double présidence de M. Mitterand en France ?

P.V. : Sans doute, mais en même temps, je dirais que les virages néo-libéraux de Tony Blair ou de Bill Clinton sont aussi responsables de ça. L’application des règles de l’Europe néo-libérale inventées par Jean-Luc Dehaene et appliquées en Belgique par ce dernier et le parti socialiste des années 1990 sont aussi responsables de ça. Ça veut dire que ce n’est pas du tout une personnalité, ni une politique d’un pays en particulier mais plutôt un ensemble de pays qui sont en train de prendre de nouvelles directions à partir des années 1980. 

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