Le FMI salue les réformes belges, mais met en garde contre une trajectoire budgétaire de plus en plus risquée.
Le Fonds monétaire international (FMI) a présenté mardi son évaluation annuelle de la situation économique et financière de la Belgique. Si l’économie belge « résiste encore aux turbulences », l’institution internationale avertit qu’elle demeure « enfermée dans une dynamique de déficits élevés et de dette publique croissante », une trajectoire jugée préoccupante à moyen terme. Le FMI appelle dès lors à « réduire plus vigoureusement les dépenses courantes », faute de quoi les marges de manœuvre budgétaires pourraient rapidement se refermer.
Les politiques actuellement menées sont saluées sur le principe. Le FMI estime que les réformes engagées en matière de fiscalité, de pensions, de marché du travail et de soins de santé vont dans la bonne direction et doivent être mises en œuvre « de manière résolue et sans affaiblissement ». Mais l’institution souligne que ces efforts restent insuffisants face à l’accumulation des chocs et des contraintes, dans « un environnement international de plus en plus incertain », marqué par les tensions commerciales, la transition écologique et l’envolée des dépenses de défense. La priorité doit désormais être, insiste-t-elle, « une réduction plus franche des dépenses courantes, une amélioration tangible de l’efficacité de l’investissement public et des dépenses sociales, ainsi qu’une rationalisation en profondeur des dépenses fiscales ».
“Le vieillissement accéléré de la population pèse lourdement sur les perspectives de croissance et fait exploser les coûts futurs.”
Le FMI avertit surtout que, malgré les réformes annoncées, « la dette publique belge devrait continuer à augmenter jusqu’en 2030 ». Le vieillissement accéléré de la population pèse lourdement sur les perspectives de croissance et fait exploser les coûts futurs. Les hypothèses retenues par le gouvernement fédéral pour ramener le déficit à 3 % du PIB d’ici 2029 sont jugées « optimistes ». Les mesures prévues permettraient avant tout de stabiliser le déficit, sans enrayer la dynamique d’endettement. Une situation qui n’est pas sans danger. « L’expérience internationale montre que la confiance des marchés peut se détériorer brutalement », met en garde le FMI, soulignant le risque d’un ajustement forcé et désordonné.
Dans le détail, des marges d’économies subsistent selon l’institution, notamment dans le domaine des pensions, dont les dépenses devraient continuer à représenter environ 12 % du PIB. Le FMI évoque également des « gains d’efficacité substantiels » possibles dans les soins de santé et dans l’enseignement, tout en pointant le manque de coordination et de planification entre le niveau fédéral et les entités fédérées pour les investissements publics.
Moins d’exemptions fiscales
Sur le plan fiscal, le FMI réaffirme la nécessité de déplacer une partie de la charge pesant sur le travail vers le capital, notamment via la taxation des plus-values. Mais il souligne que « le niveau élevé d’exemptions » réduit fortement le rendement et l’équité de cette mesure. « Ces exemptions pourraient être revues à la baisse afin de générer davantage de recettes et de cohérence fiscale », a expliqué mardi Jean-François Dauphin, chef de mission du FMI.
Plus largement, l’institution invite la Belgique à examiner « l’ensemble des mécanismes d’exemptions et d’incitants fiscaux ». Leur coût est loin d’être marginal. « En 2021, le total de ces exemptions représentait 6,1 points de PIB, soit l’équivalent de 38 milliards d’euros en valeur 2025 », a rappelé Jean-François Dauphin. « Il est indispensable de vérifier si ces dispositifs répondent toujours à une priorité de politique publique, s’ils sont réellement efficaces et s’ils le sont à un coût acceptable. Si ce n’est pas le cas, ils doivent être réformés. Les économies potentielles sont considérables. »
En matière d’emploi, le FMI appelle à un effort accru en matière de formation et à une réduction de la fragmentation persistante du marché du travail entre Régions, qui freine la mobilité et pèse sur le taux d’emploi global.
Approfondissement du marché unique
Enfin, l’institution encourage la Belgique à renforcer sa coopération au niveau européen, notamment autour de l’approfondissement du marché unique, du développement de l’union de l’épargne et des investissements et de l’intégration du marché de l’énergie.
« Ces réformes seront politiquement sensibles et socialement coûteuses. Beaucoup en ressentiront les effets directs », conclut Jean-François Dauphin. « Mais sans action plus déterminée, la trajectoire budgétaire actuelle expose la Belgique à des ajustements beaucoup plus brutaux et douloureux à l’avenir. »
Le rapport complet du Fonds monétaire international, dont seul un résumé a été présenté mardi au siège de la Banque nationale de Belgique, sera publié à la mi-février.
La rédaction
(BELGA PHOTO NICOLAS MAETERLINCK)