Ces 24, 25 et 26 novembre, la Belgique s’apprête à vivre une nouvelle démonstration de force syndicale. Après la grande manifestation du 14 octobre, qui avait réuni entre 80.000 et 120.000 personnes dans les rues de la capitale sans infléchir la ligne du gouvernement, la colère du monde du travail revient, plus organisée, plus ample, plus résolue.
Dans leur appel, les syndicats – CSC, FGTB et CGSLB – emploient un lexique inhabituellement solennel. Ils dénoncent « le désert budgétaire de l’Arizona », martelant le besoin d’« une société solidaire, équitable et juste », avec « des pensions décentes, une répartition équitable des efforts » et le refus catégorique d’un démantèlement progressif des protections salariales. Trois jours de grève, organisés « en crescendo », pour tenter de faire plier un exécutif jugé sourd aux revendications.
Aéroports à l’arrêt : pas de départ de Bruxelles mercredi
Le pic de perturbations interviendra mercredi 26 novembre. Brussels Airport a d’ores et déjà prévenu : aucun vol passager ne décollera ce jour-là, les services de sûreté et de manutention étant massivement en grève. Les compagnies aériennes contacteront directement leurs passagers pour organiser reports ou remboursements. Si certains vols à l’arrivée pourraient être encore assurés, une vague d’annulations est attendue. L’aéroport demande à ses usagers de ne pas se déplacer inutilement. Charleroi Airport se prépare lui aussi à une journée blanche, les décollages et atterrissages ne pouvant être garantis.
Le rail d’abord : SNCB paralysée dès dimanche soir
Dès ce dimanche soir à 22 heures, le pays bascule dans une paralysie ferroviaire presque totale. Le trafic sera fortement réduit durant 72 heures, jusqu’à mercredi soir, en raison de l’arrêt de travail du personnel de la SNCB et de ses filiales. Les syndicats des cheminots ne cachent pas que l’épreuve de force pourrait se prolonger au-delà de trois jours si le gouvernement persiste dans ses projets de réforme des retraites du personnel ferroviaire et de réorganisation interne.
Un plan de circulation minimal, fondé sur les volontaires présents, sera mis en place. La compagnie recommande toutefois aux usagers de « consulter régulièrement le planificateur de voyages » et de prévoir des alternatives
Bus, tramways et métros fortement affectés
Les transports urbains vivront, eux aussi, trois jours d’immobilisation partielle ou totale. À Bruxelles, la STIB annonce un service « très restreint » et invite les habitants à « envisager d’autres modes de déplacement ». En Flandre, De Lijn prévient que les horaires ne pourront être garantis et demande aux voyageurs de vérifier leur trajet quotidiennement. En Wallonie, le TEC anticipe une interruption quasi complète dans plusieurs provinces : à Liège, les bus et le tram resteront à l’arrêt. La FGTB appelle également les entreprises privées de transport en autocar à rejoindre le mouvement, ce qui pourrait accentuer encore les difficultés de déplacement.
Écoles et universités : un mouvement rare par son ampleur
Le secteur éducatif participera activement, le suivi du mouvement dépendra toutefois des établissements et des enseignants eux-mêmes. Certains établissements resteront ouverts, mais les effectifs risquent d’être insuffisants pour assurer l’ensemble des cours.
Hôpitaux, police, administrations : un pays au ralenti
Mardi et mercredi, les hôpitaux publics fonctionneront en mode minimum, avec des reports de consultations et d’actes non urgents. Certains services – chirurgie non urgente, imagerie, oncologie, dentisterie – devraient être particulièrement touchés.
La police, couverte par un préavis de trois jours, participera surtout au mouvement mardi, avec des rassemblements annoncés dans plusieurs villes – mais un service minimum restera garanti.
Les administrations communales, crèches et services locaux fonctionneront eux aussi en service réduit, voire resteront fermés, avec des piquets annoncés devant de nombreux bâtiments publics.
Collecte des déchets, poste : des conséquences visibles au quotidien
La collecte des déchets pourrait être suspendue dans plusieurs communes, comme souvent en période de grève nationale. Des rares recyparcs resteront ouverts.
Chez bpost, le mouvement tombe très mal : entre Black Friday et la Saint-Nicolas, les volumes de colis explosent. L’entreprise espère limiter la casse en mobilisant près de 700 employés administratifs volontaires, mais s’attend à des retards.
Une épreuve politique pour le gouvernement
En s’attaquant simultanément aux transports, aux écoles, aux hôpitaux, aux aéroports et aux services publics, les syndicats ont choisi d’étendre la pression au maximum.
Le gouvernement « Arizona », en place depuis janvier, joue ici une partie serrée : réduire les déficits sans provoquer l’embrasement social.
J.PE.
(Photo Belga Hatim Kaghat : Bruxelles, Gare du Nord, 12 janvier 2025, à l’occasion d’une grève sur le rail)