“L’antisémitisme en Belgique avance à bas bruit”

Médecin et professeur émérite à l’Université de Louvain, le Pr Daniel Rodenstein a publié une tribune remarquée dans La Libre après la diffusion d’affiches anonymes ciblant des personnalités juives. Dans un entretien à 21News, il alerte sur une résurgence de la haine antisémite en Belgique, nourrie selon lui par des racines anciennes, un climat politique complaisant et une mutation profonde de la société bruxelloise. « Ce n’est pas un emballement ponctuel. C’est une température qui monte. Et les Juifs sont la grenouille dans la casserole », admet-il.

21News : Qu’est-ce qui vous a motivé, vous qui êtes médecin et professeur émérite à l’Université de Louvain, à écrire une tribune dans La Libre ? Quelle était votre motivation première ? Avez-vous été choqué, scandalisé ?

Pr Daniel Rodenstein : Scandalisé, je ne dirais pas. J’ai été surpris, j’ai été peiné, et j’étais – le mot ne me dérange pas – fâché.

21News : Fâché ? Vous avez découvert comme nous ces affiches. Pour nos lecteurs, de qui s’agit-il exactement ? De quelles personnalités juives parle-t-on ?

D.R. : Je ne les connais pas personnellement, sauf une. Peu m’importe de qui il s’agit. C’est indigne.

21News : A-t-on une idée de l’auteur ? Vous en savez plus que nous ?

D.R. : Je l’ignore. Mais encore une fois, ce n’est pas ça l’important.

« La haine des Juifs progresse par petits pas, tellement petits qu’on ne les voit pas venir. Et puis un jour, il est trop tard. »

21News : Dans votre tribune, vous comparez cette affaire à une sombre époque de notre histoire. Vous évoquez les années 30…

D.R. : Je compare à deux situations. D’abord, à mon enfance, en Argentine : les bandes dessinées qui montraient des images de l’Ouest américain avec la figure du méchant affichée sur les murs avec « Wanted ». Ensuite, aux affiches politiques antisémites qui ont une très longue histoire. Il y en a eu dans les années 1930, 1920, 1910, autant en Allemagne qu’en France, en Russie qu’en Belgique.