La traque aura duré des années. Omar G., de son vrai nom Omar Govers, figure centrale du trafic de cocaïne via le port d’Anvers, a été interpellé à Dubaï, annonce la Gazet van Antwerpen. Celui que la police et les magistrats appelaient « Patje Haemers » – clin d’œil assumé au braqueur Patrick Haemers – était l’un des fugitifs les plus recherchés du royaume. Il avait déjà été condamné à plusieurs reprises par défaut en Belgique, pour un total dépassant les 50 ans de prison.
L’arrestation tombe au moment même où la ministre de la Justice, Annelies Verlinden, se trouve aux Émirats arabes unis pour une visite de travail. Un hasard de calendrier qui souligne l’importance de la coopération judiciaire belgo-émiratie dans la lutte contre la « narco-économie » d’Anvers.
Un « cerveau » du milieu
Originaire de Merksem, Omar Govers s’est imposé en une quinzaine d’années comme l’un des cerveaux du trafic de cocaïne en Europe du Nord. Il n’était pas un simple logisticien : son nom apparaît dans des dossiers portant sur l’importation de plus de 26 000 kg de cocaïne, via des conteneurs infiltrés dans le port d’Anvers.
Les juges estiment que son organisation aurait engrangé jusqu’à 677 millions d’euros de profits, blanchis en partie à l’étranger. Ses « runners » – des coursiers chargés d’écouler la marchandise dans la ville – faisaient le lien entre les docks et les quartiers de distribution.
L’une des méthodes attribuées à son réseau, la « switch-methode », consistait à échanger discrètement le contenu d’un conteneur légitime par un chargement de drogue, afin d’éviter tout contrôle douanier. Une mécanique bien huilée, inspirée des cartels sud-américains, qui lui a valu des condamnations successives : 20 ans dans un dossier d’importation, 15 ans dans un autre, et ainsi de suite, jusqu’à dépasser 50 ans cumulés.
Dubaï, refuge des narco-élites européennes
Comme plusieurs barons néerlandais et belges, Omar Govers avait trouvé refuge à Dubaï, où il menait une vie luxueuse tout en se présentant sous une fausse identité. Il y aurait monté une société immobilière, vitrine du blanchiment de ses profits.
Ce n’était pas sa première interpellation : il avait déjà été brièvement détenu en 2022 dans l’émirat après « un comportement inapproprié » dans un lieu public, selon une source policière. Il avait alors échappé à l’extradition.
Cette fois, la donne semble différente. L’accord de coopération judiciaire récemment renforcé entre Bruxelles et Abou Dhabi permet théoriquement une remise rapide à la Belgique, comme ce fut le cas pour deux autres figures du milieu, Dikke Nordin et Othman E.B.
Un coup d’arrêt… ou un simple changement de têtes ?
Avec la chute de « Patje Haemers », les autorités belges espèrent affaiblir l’une des branches les plus structurées de la cocaïne anversoise. Mais personne ne se fait d’illusions : les flux ne se tarissent pas, les filières se remplacent, et le port reste la principale porte d’entrée de la poudre blanche en Europe.
La rédaction
(©PHOTOPQR/LE REPUBLICAIN LORRAIN/Hugo AZMANI)