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Les agriculteurs manifestent à l’aéroport de Liège contre l’accord UE-Mercosur

par Harrison du Bus
Eric Broncard/Hans Lucas

Des agriculteurs wallons, rejoints par des collègues flamands, français et européens, se sont rassemblés ce mercredi à l’aéroport de Liège-Bierset pour dénoncer l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur. Une action symbolique, à quelques jours d’un possible feu vert politique au traité, qui cristallise les craintes du monde agricole face à une concurrence jugée déloyale.

Une dizaine de tracteurs ont convergé vers le site en fin de matinée, sans perturber l’activité de l’aéroport ni la circulation routière. Les manifestants, emmenés notamment par la Fédération unie de groupements d’éleveurs et d’agriculteurs (FUGEA), ont déployé une large bâche et scandé leur opposition à un accord qu’ils considèrent comme le symbole d’une politique commerciale « injuste et dangereuse ».

La crainte d’une concurrence jugée déloyale

Au cœur de la contestation : la perspective d’importations agricoles en provenance d’Amérique du Sud ne respectant pas les normes environnementales, sanitaires et sociales imposées aux producteurs européens. « Les produits importés ne seront pas soumis aux mêmes règles que les nôtres, notamment en matière de pesticides ou d’hormones de croissance », alerte Hugues Falys, porte-parole de la FUGEA. Une situation qui, selon les syndicats agricoles, fragiliserait encore davantage des exploitations déjà sous pression.

Les agriculteurs réclament également des prix plus justes et plus stables, ainsi qu’une vision à long terme de la politique agricole européenne. « Ce que veut l’Europe, c’est nourrir ses citoyens à bas coût. Nous, nous proposons une alimentation saine et durable », souligne Philippe Duvivier, président de la FUGEA. Derrière le rejet de l’accord UE-Mercosur, c’est plus largement la trajectoire de la politique commerciale européenne qui est mise en cause.

Un choix de lieu contesté

Le choix de l’aéroport de Liège n’est pas anodin. Les manifestants voient dans cette infrastructure une « plaque tournante » des échanges internationaux, emblématique de la mondialisation qu’ils dénoncent. « Aujourd’hui, il n’y a pas de viande du Mercosur qui arrive ici, mais il n’est pas impossible qu’à l’avenir ce soit le cas », avance Hugues Falys.

Cette lecture est toutefois contestée par la direction de l’aéroport de Liège. « On comprend le désarroi des agriculteurs et on les soutient, mais ils se trompent de cible », estime Christian Delcourt, porte-parole de l’aéroport. Selon lui, le transport aérien de viande ou de produits agricoles de base serait économiquement absurde. « Nous transportons de l’e-commerce, des fleurs, mais pas de produits agricoles au sens où l’entendent les agriculteurs », insiste-t-il, tout en reconnaissant le rôle de l’aéroport dans la mondialisation des échanges.

Vers une mobilisation d’ampleur à Bruxelles

La mobilisation de ce mercredi s’inscrit dans un mouvement plus large. Une manifestation d’envergure est annoncée ce jeudi à Bruxelles, où plusieurs centaines de tracteurs et des milliers de manifestants sont attendus, avec d’importantes perturbations de la circulation à la clé. Des délégations étrangères, notamment françaises, doivent également rejoindre le cortège.

Alors que l’accord UE-Mercosur pourrait être soumis prochainement aux États membres puis au Parlement européen, les agriculteurs entendent peser sur le calendrier politique. « On sait que ça ne fonctionne pas », résume Hugues Falys à propos des promesses de contrôles et de clauses miroirs avancées par la Commission européenne. À leurs yeux, l’enjeu dépasse largement un traité commercial : il touche à l’avenir même de l’agriculture européenne.

Harrison du Bus

(Eric Broncard/Hans Lucas)

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