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Mathieu Bock-Côté : « nous vivons la seconde chute de Rome »

par Harrison du Bus
D.R.

Le sociologue et chroniqueur Mathieu Bock-Côté inscrit la période actuelle dans une perspective longue : celle d’une civilisation qui se découvre vulnérable, peut-être au seuil d’un basculement historique comparable aux grandes ruptures du passé européen. Au fil d’un échange dense il revient sur l’après-1989, la perte du magistère occidental, l’emprise de la technostructure, la recomposition populiste, les fractures internes de l’UE, la démographie, l’immigration, l’islamo-gauchisme et l’avenir du politique. Un entretien d’ampleur, à la fois analytique et crépusculaire.

Entretien avec Mathieu Bock-Côté

21News : Vous estimez que nous vivons un moment que les historiens du futur pourront nommer comme une époque distincte, un chrononyme. Si vous deviez fixer les bornes temporelles de cette séquence occidentale, où les situeriez-vous ?

MBC : Le cycle historique qui s’achève sous nos yeux a commencé en 1989. Avec la chute du mur de Berlin, puis du communisme, la mondialisation devient l’horizon indépassable de l’humanité – ou plutôt, devrais-je dire, le mondialisme. La diversité profonde du monde semble se dissoudre dans un fantasme d’homogénéité globale, sous le signe du marché et des droits de l’homme. On croit alors qu’un seul monde va émerger, sans frontières, sans peuples, sans identités irréductibles, où les cultures ne survivront plus qu’à la manière de folklores résiduels. En quelque sorte, le flambeau révolutionnaire passe alors de l’est à l’ouest, avec en son cœur une nouvelle définition de l’homme nouveau. Les élites mondialistes qui s’installent à partir de 1989 au pouvoir croient piloter le monde vers la fin de l’histoire, vers une forme de réconciliation des hommes, comme si la promesse de Babel pouvait enfin être tenue. Mais ce grand récit est traversé par une contradiction. Au moment où l’Occident se croit universel, l’esprit du monde, pour reprendre la formule hégélienne, commence à se déplacer vers l’Asie, et là de nouveaux blocs civilisationnels émergent. Ils ne se croient pas en rattrapage avec le monde occidental, ils n’entendent pas le mimer. Évidemment, et pour revenir à votre question, plusieurs cycles historiques s’entremêlent. On pourrait évidemment mentionner d’autres événements-symboles, qui deviennent des repères civilisationnels : 1492, qui marque le début de l’expansion européenne ou 1789 qui lance l’hypothèse révolutionnaire. Mais si je devais nommer l’ère présente, j’y verrais la période où l’Occident cesse d’être la référence universelle et doit repenser son identité propre.

Ce n’est pas le retour d’un totalitarisme classique, mais d’un autoritarisme administratif, qui se pare des oripeaux du progrès et des science sociales et est traversé par une tentation totalitaire.

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