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Theo Francken: « la Russie a confiance en ses capacités militaires »

par Maxence Dozin

Le ministre de la défense s’est exprimé longuement dans le colonnes du Morgen sur les « dossiers chauds » de la défense, de la possibilité d’une guerre menée par la Russie, l’achat des F-35.

Un des dossiers liés à la défense les plus commentés dernièrement par la presse concerne l’achat de onze chausseurs F-35 américains supplémentaires (voire notre interview sur le sujet). Certains experts estiment que cet avion est « désactivable » à distance par les Etats-Unis, rendant son opérabilité potentiellement restreinte en zone de combat. M. Francken balaie cette idée : « ce dispositif n’existe pas », confie-t-il, préférant capitaliser sur le fait, estime-t-il, que « (nous sommes) tous interconnectés à l’OTAN, la plupart des grands programmes de défense étant multinationaux ». Le ministre de la Défense estime par ailleurs que Dassault, constructeur du Rafale, n’a « même pas soumis de proposition à l’État belge. » « Les F-35 », conclut-il, « sont de toute façon meilleurs ».

Le ministre de la Défense s’insurge par ailleurs contre les accusations visant à faire penser qu’il est immoral de signer des contrats avec l’administration Trump. « Que ferons-nous quand Marine Le Pen accédera à la présidence (française)? Ou quand Geert Wilders deviendra Premier ministre (des Pays-Bas)? On arrêtera aussi d’acheter français ou néerlandais? Où se situent les barrières morales? Ne s’appliquent-elles qu’à Donald Trump? ».

« La Russie est sûre d’elle-même »

M. Francken met par ailleurs en garde : la Russie est sûre d’elle-même : « Moscou a augmenté ses capacités militaires et produit quatre fois plus de munitions que toute l’Alliance réunie. On ne peut même pas comparer les budgets parce que la Russie peut acheter beaucoup plus que nous avec le même montant », estime le ministre.

Le ministre de la Défense estime que Vladimir Poutine « ne souhaite pas vraiment négocier et cherche à exploiter au maximum les faiblesses de l’Europe ». « Plus vite nous nous réarmerons », soutien-t-il, «  plus ses chances de conquérir l’Ukraine s’amenuiseront. Mais nous ne pourrons pas venir à bout des Russes sans déployer des centaines de milliers de soldats européens en Ukraine » ; solution dont il estime qu’elle « ne suscitera jamais l’enthousiasme général ». M. Francken voit donc les sanctions économiques comme étant les seules à même de faire plier la Russie.

Donald Trump envisage désormais de fournir à l’Ukraine des missiles Tomahawk à longue portée, capables d’atteindre jusqu’à 2 000 km à l’intérieur des terres russes. Le Kremlin a qualifié cette annonce de « tournant dramatique » : « Poutine avait déjà réagi de la même façon quand la Finlande et la Suède ont rejoint l’Otan, ou quand nous avons livré des chars, des missiles ou des F-16 », soutient-il. « Nous ne devons pas nous laisser menacer. Au début, nous n’osions riposter que sur le sol ukrainien, par crainte de la réaction de Poutine. Résultat : la guerre s’est prolongée. Il faut frapper, comme nous le faisons maintenant. C’était aussi une ligne rouge pour Poutine — et qu’a-t-il fait ? Rien. Il sait parfaitement que s’il use de l’arme nucléaire, Moscou sera rayé de la carte. La fin du monde serait alors proche. »

« L’Europe fait preuve d’une incroyable partialité envers les États-Unis »

Interrogé sur le risque d’une frappe russe contre Bruxelles, M. Francken balaie l’hypothèse : « Frapper le cœur de l’Otan ? Moscou serait détruite dans la foulée. » Sur la fiabilité du soutien américain et la portée de l’article 5, le ministre belge de la Défense se montre agacé : « bien sûr que Donald Trump le respectera. L’Europe fait preuve d’une incroyable partialité envers les États-Unis. Pourquoi ne respecterait-il pas cette clause ? » Selon lui, certaines déclarations de M. Trump en ce sens doivent être « ignorées ».

Enfin, sur la possibilité d’une attaque russo-chinoise contre l’Occident d’ici 2027, il répond : « C’est possible. La Chine a intérêt à ce que la guerre en Ukraine dure — elle affaiblit l’Occident. Elle achète massivement des matières premières russes, fournit des armes et soutient le rapprochement avec Pyongyang. La récupération de Taïwan par la Chine paraît probable ; les États-Unis veulent donc se concentrer rapidement sur le Pacifique. Ils attendent de nous que nous freinions les Russes. Une attaque majeure contre les pays baltes est en revanche moins probable, car ils appartiennent à l’Otan — et l’arrivée prochaine de quelque 600 F-35 en Europe rendra les Russes prudents. »

Maxence Dozin, avec rédaction

(BELGA PHOTO BRUNO FAHY)

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