Accueil » Un agriculteur français : « Nous avons l’impression d’être des variables d’ajustement d’un jeu qui nous dépasse »

Un agriculteur français : « Nous avons l’impression d’être des variables d’ajustement d’un jeu qui nous dépasse »

par Maxence Dozin

Bruxelles est redevenue ce jeudi le théâtre d’une mobilisation d’agriculteurs d’ampleur exceptionnelle, réunissant des milliers de personnes venus de toute l’Europe pour protester contre les orientations de la politique agricole européenne (PAC) et, en particulier, contre le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay). Cette mobilisation, qui s’est traduite par des affrontements avec les forces de l’ordre et des dégâts matériels notables, a fait couler beaucoup d’encre. 21news a pu s’entretenir avec Daniel Coulonval, président de la Fédération wallonne de l’agriculture (FWA), ainsi qu’avec des agriculteurs français s’étant déplacés sur Bruxelles.

À l’appel de la COPA, principale organisation syndicale agricole européenne, une petite dizaine de milliers d’agriculteurs ont convergé vers Bruxelles, dont près de 1 000 tracteurs, dans le but de relayer un message clair : l’agriculture européenne est menacée par des politiques considérées comme « déconnectées des réalités du terrain ». Le rejet du traité UE-Mercosur figure en tête de leurs revendications. Pour Daniel Coulonval, président de la fédération wallon de l’agriculture (FWA), qui tient à se désolidariser des dégradations perpétrées « certains acteurs débarqués sur place », « le rejet de l’accord du Mercosur tel que présenté constituait la première revendication de la FWA, car nous jugeons que celui-ci est déséquilibré et nécessite des mesures d’accompagnement beaucoup plus sérieuses que celles qui sont sur la table ». « Ceci étant », rappelle M. Coulonval, « la Commission a pris la décision de remporter la signature de l’accord pour permettre, justement des ajustements. On peut donc considérer que nous avons été entendus ». 

Un budget de la PAC en baisse, ou en tout cas pourvoyeur de moins de fonds « directs »

« Concernant la PAC », poursuit M. Coulonval, « son budget ne nous convient pas du tout tant sur la manière dont il est présenté que sur les moyens mis en place et sur les nouvelles règles de gouvernance (la Commission européenne a présenté une série de propositions dans le cadre du cadre financier pluriannuel (2028-2034), qui prévoit notamment une baisse de aides directes, NDLA). « Mais l’on s’y attendait un petit peu parce qu’on sent bien que la Commission européenne est un paquebot qui a difficile à manœuvrer et que quand des orientations sont prises, elles ne sont pour de longues périodes parce qu’ils ne savent pas bouger ». Par ailleurs, et pour nombre d’agriculteurs européens, le traité dit du « Mercosur » — en cours de finalisation depuis 25 ans — ouvrirait massivement le marché européen à des produits agricoles sud-américains à bas coût, dont les standards sanitaires, environnementaux et sociaux ne seraient pas équivalents à ceux exigés au sein de l’UE, créant une concurrence qu’ils jugent “injuste” et destructrice pour les exploitations familiales. 

C’est aussi l’avis d’agriculteurs français rencontrés à Bruxelles ce jeudi. Pour Bertrand Tourard, exploitant agricole des Hauts-de-France, « les revendications portées par le mouvement agricole français portent effectivement sur le traité du Mercosur, sur les taxes supplémentaires sur les importations d’engrais, ainsi que sur une réduction prévue du budget de la politique agricole commune (PAC) » que M. Tourard estime à 20%. « En ce qui concerne le premier », poursuit l’agriculteur, « s’il est signé, c’est en priorité pour l’État français pour vendre des armes, et en échange importer de la viande, des céréales, de l’éthanol et du sucre qui viennent du Brésil où on déforeste à tout venant ». « Quant à la PAC », poursuit-il, « elle ne brille pas par une équité entre ses différents acteurs, dans la mesure où les cahiers des charges ne sont pas communs aux différentes nations – en produits phytosanitaires et en engrais. Des molécules sont retirées au fur-et-à mesure par principe de précaution. Quant à certains produits type Glyphosate, par exemple, les quantités permises varient de pays en pays ».

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