Mathématicien et informaticien français, professeur à l’Université du Luxembourg depuis 2003, Franck Leprevost détaille l’entrisme woke et le conformisme néo-progressiste qui contaminent de plus en plus l’université occidentale. Entretien.
21 News : Comment expliquer la polarisation politique actuelle dans les universités, où les enseignants se déclarant à gauche ou à l’extrême gauche sont de plus en plus nombreux par rapport à ceux de droite ?
Pr Franck Leprevost : Dans les universités américaines, en effet, les travaux de Jon Haidt de la New York University ont montré la rapide accélération de la polarisation politique des professeurs d’université. Une étude parue en 2015 et 2016 montre que jusqu’en 1996 prévalait un rapport de 2 à 1 entre les professeurs se déclarant de gauche d’un côté et ceux se déclarant de droite de l’autre. Plus précisément, environ 40 % se disaient de gauche, 20 % de droite, et 40 % étaient silencieux sur leur orientation politique. Ce rapport est passé entre 1996 et 2011 à 5 à 1 ; 60 % des professeurs se disant de gauche, 12 % de droite, et 25 % silencieux. Ceci en mettant tous les départements ensemble. Si on ne prend que les départements de sciences sociales, des humanités ou de psychologie, le rapport monte entre 17 à 1 et 60 à 1. Ce phénomène n’a certainement pas été inversé depuis cette étude. D’autres enquêtes, notamment auprès de Sciences Po en France, vont dans le même sens, polarisé et à gauche toute. Quelles explications avancer ? Il faudrait une étude très sérieuse pour avoir des certitudes. Cependant, on peut avancer quelques conjectures.
D’une part, la polarisation rappelée ci-dessus crée les conditions de son déploiement et de sa pérennité : le milieu ambiant rejette les « déviants » à l’idéologie dominante (voir exemples ci-dessous, NdlR). La prolétarisation dans certains pays du poste de professeur, l’érosion d’un statut autrefois de notable, le faible attrait des carrières universitaires alors même que la compétition y est féroce, ont probablement conduit certaines classes sociales, plus conservatrices dans l’âme, à épouser des carrières différentes de celles de l’enseignement supérieur et de la recherche, et à privilégier des trajectoires plus lucratives et respectées dans l’industrie ou les services. En ce qui concerne les dernières années, les exemples affligeants donnés par certaines universités n’ont certainement pas encouragé les vocations (lire ci-dessous, NdlR).
« Tout le monde pense la même chose et gare à ceux qui pensent différemment. »
21 News : Quels sont les impacts de cette polarisation politique sur la diversité des opinions et des discours académiques au sein des universités ?
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