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Ceux qui se lèvent (Carte blanche)

par Contribution Externe

La fin de l’année n’est pas seulement un point d’arrêt. C’est un seuil. Un moment où l’on peut encore décider de ce que l’on emportera avec soi — et de ce que l’on laissera enfin derrière.

Dans la lumière oblique de décembre, quand les villes ralentissent et que les voix se rapprochent, quelque chose devient perceptible : malgré le bruit du monde, malgré les fractures et les fatigues, des femmes et des hommes tiennent encore debout. Ils ne font pas la une. Ils ne cherchent pas l’éclat. Mais ils existent. Et ils agissent.

Je crois en eux. Je crois à ces enseignants qui continuent de transmettre sans céder à la lassitude.

À ces élus locaux qui refusent la facilité du renoncement.

À ces citoyens qui mouillent la chemise, chaque jour, pour que l’universel ne soit pas un mot creux mais une réalité vécue.

À ceux qui entrent dans la complexité sans peur, et qui préfèrent le travail patient à l’indignation confortable.

L’universel ne s’installe jamais tout seul. Il ne descend pas du ciel. Il se construit à hauteur d’homme, par des gestes concrets, parfois ingrats, souvent invisibles. Il demande du courage, de la constance, et surtout une chose rare : la volonté de rester quand d’autres se retirent.

Je regarde cette fin d’année comme on regarde un champ après la tempête. Tout n’est pas détruit. Des racines ont tenu. Des graines attendent. Il faudra du temps, des mains, de l’attention. Mais rien n’est perdu.

Partout, je vois des consciences qui s’éveillent. Des voix qui refusent la résignation. Des femmes et des hommes qui comprennent enfin que la paix ne se décrète pas, qu’elle se construit. Que la tolérance sans exigence n’est qu’un abandon déguisé. Et que la fraternité commence par le refus du mensonge.

Je crois aussi à ceux qui, ailleurs, lèvent la tête.

À ceux qui vivent sous la contrainte, sous la censure, sous la peur, et qui pourtant continuent d’écrire, d’enseigner, de soigner, de résister. Les dictatures ne tombent pas d’un coup : elles se fissurent lentement, par l’accumulation de gestes courageux. Par la persévérance de femmes et d’hommes qui refusent de plier l’échine.

Le monde n’est pas condamné à la brutalité. Il est simplement à la hauteur de ce que nous acceptons.

En cette fin d’année, je fais le pari de l’engagement. Pas celui des grandes déclarations, mais celui de la présence réelle. Être là. Tenir. Faire. Transmettre. Refuser la peur comme boussole politique. Refuser la haine comme horizon.

L’universel n’est pas fragile. Il est exigeant. Il demande qu’on s’en montre digne.

La nouvelle année viendra avec son lot d’épreuves, mais aussi avec des possibles immenses. À condition que nous soyons assez nombreux à retrousser les manches, à sortir des mots, à entrer dans l’action.

Je crois profondément que les hommes et les femmes de bonne volonté sont plus nombreux qu’on ne le dit. Ils sont simplement moins bruyants. Mais quand ils se mettent en mouvement, ils changent le cours des choses.

La fin de l’année n’est pas un repli. C’est un appel. À construire ici ce qui libère. À soutenir ailleurs ceux qui se battent pour tomber les murs. À faire de l’universel non pas un slogan, mais une promesse tenue.

Et tant qu’il y aura des voix pour croire encore en l’humain — alors l’avenir restera ouvert.

Kamel Bencheikh – Contribution externe

(©PHOTOPQR/L’INDEPENDANT/Nicolas Parent)

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