Portées par les conflits en Ukraine et à Gaza ainsi que par la montée des tensions internationales, les ventes des 100 plus grands fabricants d’armes au monde ont atteint un niveau inédit en 2024, selon le dernier rapport de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), dont le journal l’Echo se fait le relai. Malgré des capacités de production parfois sous pression, le secteur a généré 679 milliards de dollars (586 milliards d’euros), soit une hausse de 5,9 % en un an.
Le classement reste largement et sans surprise dominé par les États-Unis. Six des dix premières entreprises sont américaines et 39 des 100 principaux groupes d’armement proviennent d’outre-Atlantique. En tête figurent Lockheed Martin, RTX (ex-Raytheon Technologies) et Northrop Grumman. À noter que SpaceX fait son entrée dans ce classement : son chiffre d’affaires militaire a plus que doublé en un an, atteignant 1,8 milliard de dollars.
Europe : forte croissance mais contraintes persistantes
En Europe, les 26 plus grands groupes ont vu leur chiffre d’affaires grimper de 13 %, pour atteindre 151 milliards de dollars. La progression la plus spectaculaire revient au Czechoslovak Group, dopé par l’Initiative tchèque sur les munitions pour l’Ukraine, avec un bond de 193 % à 3,6 milliards.
L’allemand Rheinmetall enregistre lui aussi une hausse notable (+46 %). Les industriels européens font toutefois face à d’importants défis logistiques : raréfaction de certains matériaux, réorganisation des chaînes d’approvisionnement, hausse des coûts. Airbus et Safran ont dû remplacer les livraisons de titane en provenance de Russie ; Thales et Rheinmetall souffrent des restrictions chinoises sur les minéraux critiques.
A noter qu’aucun fabricant belge n’apparaît dans le classement. John Cockerill (CMI à l’époque) n’y avait figuré qu’en 2016 grâce à un contrat de tourelles pour l’Arabie saoudite, tandis que FN Browning reste éloignée du seuil d’entrée si l’on se limite à son activité défense.
Une production sous pression en Russie
Deux groupes russes – Rostec et United Shipbuilding Corporation – figurent toujours dans le Top 100. Leurs ventes cumulées ont progressé de 23 %, à 31,2 milliards de dollars, malgré les sanctions internationales et le manque de composants. La demande intérieure compense largement l’effondrement des exportations, mais l’industrie peine à recruter la main-d’œuvre qualifiée nécessaire pour soutenir les cadences imposées par l’effort de guerre.
Contrairement aux tendances mondiales, les ventes des géants chinois de l’armement, quant à eux, ont diminué en 2024. Les campagnes anticorruption ont entraîné reports et annulations de contrats majeurs.
Turquie, Japon, Corée du Sud et Israël en forte dynamique
Le classement 2024 du Sipri inclut cinq entreprises turques, désormais créditées d’un chiffre d’affaires combiné de 10,1 milliards de dollars (+11 %). L’entrée de MKE dans le Top 100 illustre la montée en puissance de l’industrie turque.
Les entreprises japonaises et sud-coréennes profitent, elles, d’une demande intérieure et européenne soutenue. Les quatre groupes sud-coréens enregistrent une hausse de 31 %, pour un total de 14,1 milliards.
Quant aux entreprises israéliennes, elles semblent peu affectées par les critiques internationales liées à la guerre à Gaza. Leurs ventes cumulées progressent de 16 %, les commandes étrangères demeurent « soutenues », selon le Sipri.
La rédaction
(Hans Lucas via AFP)