L’ancien chef de l’anticorruption inculpé pour violation du secret de l’instruction confesse : « Nous avions un deal avec les journalistes » et pointe du doigt le procureur.
Nom de code : Opération Mezzo. C’est l’histoire d’une grande enquête qui devait marquer l’apogée et le courage de la justice belge dans sa lutte contre la corruption présumée au sommet des institutions européennes, par des puissances étrangères : le Qatargate. Trois ans plus tard, que reste-t-il de cette opération digne des plus grands romans d’espionnage ? Elle a entamé ce lundi 8 décembre une phase décisive, avec l’ouverture des débats devant la chambre des mises en accusation de Bruxelles. Plusieurs fois reportés, les débats devant cette juridiction devraient s’étaler durant le mois de décembre. Et le risque que le Qatargate se transforme en fiasco, en « Belgiangate » pour reprendre l’expression choisie par des médias italiens, est bien réel. Notre enquête révèle les nombreuses failles et dérives de l’enquête, un manque potentiel d’impartialité et des violations répétées des procédures de la part de personnages importants de notre système policier et judiciaire.
Au centre de ce jeu, deux des principaux responsables de l’enquête dont l’ancien chef de l’anticorruption (OCRC). Inculpé pour violation du secret de l’instruction, il confesse : « Nous avions un deal avec les journalistes » et pointe du doigt le procureur.
La Belgique, pays du surréalisme. L’œuvre « Ceci n’est pas une pipe » de René Magritte est devenue iconique. « Ceci n’est pas une enquête » pourrait bientôt coller à la réputation du Qatargate. Car si une enquête a bel et bien été menée par la justice belge, avec un déploiement de moyens et un retentissement médiatique hors du commun, elle ne semble pas avoir respecté toutes les balises légales et déontologiques d’une enquête irréprochable. Loin de là.
Au cœur du problème, on retrouve les deux principaux responsables de l’enquête, dont l’ancien haut gradé de l’anticorruption (OCRC). Une sorte de « gorge profonde » incontrôlable qui adore visiblement les journalistes, au point d’avoir mis en place un véritable réseau médiatique tentaculaire pour alimenter de nombreux médias francophones et flamands. Mais avec le Qatargate, « gorge profonde » (c’est ainsi que nous le nommerons ici) va accéder à un niveau supérieur, sorte de Champions League de la fuite et des violations répétées du secret de l’instruction et des procédures.
Avec le feu vert de ses supérieurs, il va échafauder une véritable cellule d’enquête parallèle et non officielle, composée de journalistes, d’enquêteurs, du procureur et d’un membre de la Sûreté de l’État. On est ici bien loin des traditionnelles fuites, dont sont légitimement friands les journalistes. Dans cette affaire, on est confronté à une approche systémique de l’organisation et de l’utilisation des fuites : chat fantôme, groupes secrets sécurisés, messages cryptés. Le réseau « clandestin » Medusa (le nom de code de ce groupe fantôme) va rythmer le calendrier des publications dans la presse, mais aussi avoir une influence directe sur le cours concret de l’enquête. Ce que la défense de plusieurs inculpés de premier plan dénonce pour mettre un terme aux poursuites.
Les soupçons d’une comptable : « 600.000 euros, mais on n’a pas encore compté l’argent… »
Pour le grand public, le Qatargate débute le 9 décembre 2022, avec un coup de tonnerre. Une vague de perquisitions menées au parlement européen et chez plusieurs suspects, l’arrestation de la vice-président du parlement, la grecque Eva Kaili (photo, à droite), d’un député européen italien, d’un ex-député européen très influent, Panzeri et de son assistant parlementaire, Francesco Giorgi, qui n’est autre que le compagnon d’Eva Kaili (à gauche sur la photo).
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