Le mouvement « No Kings », qui a réuni des centaines de milliers de personnes à travers le pays, entend résister aux dérives jugées autoritaires du 47ème président des Etats-Unis. Ceci alors que le président Trump a organisé, le jour de son anniversaire, une parade militaire ayant coûté 45 millions de dollars.
À Washington D.C., Donald Trump a célébré son 79e anniversaire avec un défilé militaire grandiose qui a rassemblé près de 7.000 soldats, 150 véhicules blindés, des hélicoptères, des avions de chasse et des parachutistes. Le président américain, installé dans une tribune officielle, a suivi les festivités pendant deux heures, malgré une météo pluvieuse qu’il a tournée en dérision sur Truth Social, assurant que « un défilé sous la pluie porte chance ». Le coût de l’événement est estimé à 45 millions de dollars.
Ce type de démonstration militaire est extrêmement rare aux États-Unis, la dernière en date remontant à 1991, après la victoire de la coalition américaine lors de la première guerre du Golfe. Seuls quelques précédents historiques — à la fin de la guerre de Sécession et des deux guerres mondiales — avaient poussé les autorités à justifier des parades d’une telle ampleur.
« Une dérive autoritaire »
Mais cette démonstration de force n’a pas fait l’unanimité. À travers tout le pays, des centaines de villes ont vu défiler des manifestants, réunis sous la bannière « No Kings ». À l’appel de groupes civiques et de syndicats, des centaines de milliers d’Américains ont dénoncé ce qu’ils perçoivent comme une « dérive autoritaire» de Donald Trump et une instrumentalisation militaire à des fins personnelles. Le mouvement s’est intensifié après les raids fédéraux controversés contre des migrants à Los Angeles, et s’inscrit dans une opposition plus large aux décrets présidentiels jugés abusifs, et à une attitude jugée de plus en plus implacable contre toute tentative d’opposition ou de critique.
Des fractures profondes
La journée a été marquée par un drame au Minnesota, où un tireur encore en fuite, déguisé en policier, s’en est pris à des politiciens locaux, assassinant la députée démocrate Melissa Hortman et son mari, et blessé grièvement le sénateur local John Hoffman et son épouse. Un tract du mouvement « No Kings » a été retrouvé dans le véhicule du suspect, ainsi qu’une liste de quelque septante personnalités « progressistes »).
Ce contraste violent entre célébration officielle et tensions sociales d’ampleur souligne les fractures profondes qui traversent les États-Unis, pays plus que jamais déchiré entre deux visions jugées irréconciliables, le plus souvent polarisées par une presse partisane, des politiciens paralysées par la peur, d’un côté, et la soumission à une figure d’un autoritarisme excessif.
Les Etats-Unis se sont construits dans un rejet du joug anglais, et dans une méfiance face au potentiel tyrannique de toute autorité. Les Pères fondateurs de la nation ont ainsi veillé autant que faire se peut à prévoir un équilibre des pouvoirs (Checks and balances), ainsi qu’une Constitution censée garantir une sauvegarde des intérêts du citoyen face à ceux du pouvoir, dont le premier amendement (liberté de parole) et le deuxième (liberté de porter des armes) sont les plus connus. Trump, de par son attitude, symbolise une tension très particulière entre amour revendiqué du pays et de ses institutions, mais un autoritarisme et une ivresse du pouvoir qui le rend inaudible auprès d’une partie de plus en plus importante de ses administrés.
Maxence Dozin
(Photo Belgaimage)