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Lettre ouverte d’un écrivain franco-algérien à la Belgique qu’il aime : l’islamisme avance, et vous regardez ailleurs ! (Carte blanche)

par Contribution Externe

Kamel Bencheikh, écrivain franco-algérien et ami personnel de Boualem Sansal, nous écrit. La publication du dernier rapport sur l’entrisme des Frères musulmans l’interpelle. Nous ne sommes pas à l’abri, selon lui, du renoncement qui pourrait faire basculer notre société ouverte.

Je vous écris avec gravité et amour.

Gravité, parce que le danger est là. Il est insidieux, organisé, financé, patient.

Amour, parce que j’ai vécu assez de douleurs pour ne plus confondre la critique et la haine. Mon attachement à la Belgique est celui d’un homme libre, vivant en France, venu d’Algérie, qui sait ce que coûte le silence face à l’islamisme. Ce silence, vous êtes en train de le payer. Et vous ne l’avez même pas encore compris.

Un rapport publié en France a récemment mis en lumière ce que beaucoup d’entre nous dénoncent depuis des années dans l’indifférence générale : la Belgique est devenue un carrefour européen de la mouvance frériste. Non pas des terroristes à la kalachnikov, mais des idéologues en costume-cravate, en col blanc, en chemise de prière le vendredi. Ceux qui infiltrent, s’installent, modèlent, influencent. Ceux qui veulent islamiser la société de l’intérieur, par la lenteur, la ruse, le réseau. Ceux qui préfèrent l’ombre au fracas, la stratégie au chaos.

« Le multiculturalisme dévoyé n’est plus un projet, c’est un outil de domination. »

Le rapport français cite des faits. Des réseaux bien huilés d’associations islamistes, des mosquées affiliées, des écoles confessionnelles, des financements venus de l’étranger — Qatar, Koweït — et une centaine d’individus actifs dans cette opération d’entrisme religieux.

Vous avez lu ça ? Et après ? Qu’avez-vous fait ? Vous voulez des faits et des exemples ? En voilà : ce ne sont pas des anecdotes. Ce ne sont pas des signaux. Ce ne sont pas des hommages. Ce sont des actes politiques.

Dans le cœur battant de l’Europe, au Parlement bruxellois, un imam est monté à la tribune. Non pas pour parler de paix ou de vivre-ensemble. Mais pour entonner, dans une langue étrangère aux lois nationales, un chant sacré issu d’un texte qui n’est pas neutre. Ce n’est pas un détail. C’est une rupture. L’imam n’était pas belge. Il venait du Pakistan. Il n’a pas lu n’importe quelle sourate. Celle qu’il a choisie parle de guerre, de victoire sur ceux qu’on appelle « gens du Livre », de terres prises et d’héritages conquis. Les versets sont limpides pour qui veut entendre : « Vous habiterez leurs demeures. Vous posséderez ce qu’ils possédaient. Allah l’a voulu. »

Un parlement. Un chant de conquête. Et une ovation feutrée.

Ce jour-là, un seuil invisible a été franchi. Non pas dans le tumulte, mais dans l’habitude molle d’un effondrement. Le multiculturalisme dévoyé n’est plus un projet, c’est un outil de domination. Et la gauche locale — socialistes, écologistes — n’a pas seulement abandonné la neutralité, elle l’a troquée contre des gages, des gestes, des compromis qui n’en sont pas.

Hasan Koyuncu, vice-président du parlement francophone, élu PS, a orchestré la scène. Ce n’est pas une erreur de casting, c’est une cohérence. Le Parti socialiste belge a multiplié les concessions : voile autorisé à la STIB, fonctionnaires affichant leur foi dans l’administration, neutralité des enseignants piétinée, non-mixité tolérée dans les piscines, repas confessionnels imposés dans les écoles, égorgements rituels banalisés.

Et pendant ce temps, le parti Écolo n’a même plus la pudeur de feindre le débat. À Anderlecht, on a voté pour officialiser le port de signes religieux. En plein service public. On ne débat plus. On cède. On concourt à qui se couchera le plus vite devant les exigences communautaires.

« (L’islamisme politique) avance à pas feutrés, jusqu’à ce que plus rien ne tienne : ni la liberté des femmes, ni la liberté de conscience, ni l’école citoyenne, ni la culture partagée. »

Bruxelles bascule. La capitale de l’Europe devient la vitrine d’un renoncement. La ville n’est plus façonnée par une culture commune, mais digérée par une logique d’archipel identitaire où le sacré s’impose et la neutralité recule. Le problème n’est pas religieux. Il est politique.

Et ceux qui prétendent parler au nom du progrès ne voient pas — ou feignent de ne pas voir — que ce qu’ils promeuvent, c’est une forme lente, méthodique, irréversible de soumission.

Le monde politique tergiverse. Les partis évitent. L’administration temporise. La neutralité de l’État devient ambivalente. Le respect des religions se transforme en reddition devant ceux qui vocifèrent le plus.

La Sûreté de l’État elle-même — prudente, timorée — reconnaît qu’il existe en Belgique des dizaines d’individus qui propagent une idéologie pouvant mener à la radicalisation. Et toujours ce réflexe : tant qu’ils ne sont pas violents, ce n’est pas vraiment une menace.

Mais l’islamisme politique n’a pas besoin de violence immédiate pour être dangereux. Il a besoin d’écoles, de lieux de culte, de relais dans les communes, de médias complaisants, de responsables naïfs ou complices. Il avance à pas feutrés, jusqu’à ce que plus rien ne tienne : ni la liberté des femmes, ni la liberté de conscience, ni l’école citoyenne, ni la culture partagée.

Je vous en supplie : regardez l’Algérie, regardez la France, regardez l’histoire.

Les Frères musulmans sont passés maîtres dans l’art de se présenter en modérés.

Mais leur projet est clair : imposer, par la lente corrosion, une société conforme à leur lecture ultra-conservatrice de l’islam. Une société où la charia devient la norme tacite. Une société où la critique devient blasphème, où les femmes disparaissent de l’espace public, où la religion dicte la loi, même sans l’avouer.

Ce projet est incompatible avec les valeurs fondamentales de la Belgique.

Et pourtant, vous le tolérez. Vous le financez parfois, même involontairement. Vous détournez les yeux.

Je vous le dis sans haine : il est temps de vous réveiller.

Il faut un rapport belge, indépendant, sérieux, approfondi, sur l’entrisme islamiste en Belgique. Il existe des gens capables de s’en occuper. Je pense à Georges Dallemagne, à François de Smet… Il faut nommer les faits. Il faut cesser de confondre islam et islamisme : les premiers à souffrir de la progression frériste, ce sont les musulmans libres, les femmes croyantes qui refusent le voile, les laïques d’origine musulmane, les enfants enfermés dans des identités assignées.

La Belgique mérite mieux que d’être le laboratoire du frérisme européen.

Je vous écris avec l’espoir que mes mots éveilleront des consciences.

Je n’écris pas contre l’islam. Je n’écris pas contre les musulmans.

J’écris contre ceux qui déforment l’islam pour en faire une arme contre la liberté.

J’écris pour que la Belgique reste une terre de droits, pas un terrain d’expérimentation pour les ingénieurs de l’obscurantisme.

Il est encore temps. Mais le temps presse.

Kamel Bencheikh, écrivain franco-algérien

Dernier ouvrage publié : L’Islamisme ou la crucifixion de l’Occident, préface de Stéphane Rozès, Édition Frantz Fanon, novembre 2024.

(Photo d’illustration : Thomas Coex/AFP – 21News)

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