Bientôt un an sans gouvernement bruxellois, et certains rêvent toujours d’une coalition avec le PTB, la Team Ahidar ou l’un des deux. Ce serait une erreur politique majeure, qui entamerait la crédibilité des partis impliqués dans ce type d’alliance. Un précédent dangereux pour la gouvernabilité de la capitale.
Ecolo a perdu les élections, et de nombreux élus et militants savent que cet échec est dû à la radicalisation du parti vers la gauche au cours des dernières années. S’engager dans une coalition avec le PTB ou la Team Ahidar serait déraisonnable pour un parti accusé d’avoir déjà trop dérivé vers la gauche radicale ou le communautarisme à Bruxelles. Si les Verts choisissent cette voie, la facture électorale de 2029 sera salée, et ils n’auront plus aucune chance de reconquérir leurs électeurs modérés.
Pour le PS, le risque est également très élevé. Selon une étude interne, le parti souffre d’une image de « parti des assistés ». Il lui faut donc absolument corriger cela. Ce n’est pas en s’alliant avec le PTB qu’il pourra redresser son image — au contraire, on parlerait de « LFI-sation » du parti. Par ailleurs, le PS est en pleine phase de rénovation. Gouverner à Bruxelles avec la Team Ahidar créerait une fracture entre le PS wallon et le PS bruxellois : le premier étant bien plus attaché à des principes comme la neutralité de l’État ou l’étourdissement des animaux. Une telle alliance pourrait faire perdre au PS de nombreux électeurs en Wallonie.
Vooruit, de son côté, aurait encore plus à perdre. Le parti a lui-même pris ses distances avec le député Ahidar, estimant qu’il avait franchi plusieurs lignes rouges, notamment par des déclarations jugées proches de l’antisémitisme. Comment justifier aujourd’hui une alliance avec un élu dont on ne voulait plus au sein du parti ? De plus, une majorité flamande a été constituée à Bruxelles. Rompre cette majorité pour s’allier avec la Team Ahidar serait très mal perçu : Vooruit apparaîtrait alors comme un parti qui cède au communautarisme et à l’islamisme.
Ce que Bruxelles attend, ce n’est pas une surenchère idéologique, mais une gouvernance stable, des solutions concrètes à ses problèmes budgétaires, de mobilité, de sécurité. La Région bruxelloise est à la croisée des chemins. Les élus peuvent choisir de réconcilier Bruxelles avec elle-même — ou précipiter son morcellement. L’histoire jugera. Mais les électeurs, eux, n’oublieront pas.
Nicolas de Pape
(Photos : Belgaimage)
